Fierté | 03|

Fierté | 03|
En août 1957, la grange de M. Jean-Rhéal Séguin a pris feu et n’a pu être sauvé. Jean-Rhéal avait acheté une grande étable de 36 pieds de large par 90 de long à Moose Creek pour remplacer la perte de son bâtiment. Jean-Marie Maisonneuve se rappelle avoir participé pendant un mois à la corvée pour défaire la grange, la transporter et la reconstruction à l’extrémité du chemin Rollin, (la partie de gauche derrière la laiterie). Plus tard, la ferme a été agrandie et des silos ajoutés. Aujourd’hui Étienne et sa femme Shannon ont repris fièrement la relève des ses parents Jean-Marie Séguin et Lucie Boudreault (qui ont été très impliqués dans le mouvement franco-ontarien), et sont la 4ième génération à vivre sur la ferme.

Je suis né dans les années 60′ à St-Pascal Baylon. Autour de nous, partout il y avait des fermes. Dans ce temps là, la norme était d’environ 100 acres avec une quarantaine de vaches. C’est certain qu’il y avait des familles qui appartenaient plus grand et plus de bétail. Mais il reste, que lors de ma jeunesse, les rangs du village été peuplés en majorité par des cultivateurs. Je me rappelle de plusieurs familles: Gauthier, Laviolette, Dion, Guibord, Lalande, Brunet, Séguin, Presley; et plus loin il y avait: Desjardins, Maisonneuve, Séguin (Paul & Jean-Rhéal), Lalonde, Pilon (Armand & Gustave), Duquette (Maurice & Roger), Chartrand (Jules & Robert), Ouellette, Paquette, Parent et j’en oublie.

Revenue dans la région après 30 ans d’absence, le paysage a bien changé. Bien que certaines de ses familles sont encore présente, plusieurs ne gagnent plus leur pain à la sueur de leur front à faire les travaux de la ferme. Pour toutes sortes de raisons plusieurs de ces fermes ont été vendues à des étrangers ou les terrains sont loués pour les grandes cultures commerciales. Les rangs de campagne sont maintenant remplis de maisons. Plusieurs des granges encore debout sont utilisées pour l’entreposage, d’autres abandonnées sont en délabrement avancé, abîmées par le temps et les intempéries.

Malgré cela il y a des fermes qui au fils des ans, ont bien survécu aux rigueurs de la vie rurale et une nouvelle génération a pris fièrement la relève. Il en est ainsi pour deux fermes qui illustrent le mois de mars, celle des Séguin sur le chemin Rollin près du lac Cobb et celle des Maisonneuve sur le chemin du même nom.

Ferme Maisonneuve à St-Pascal Baylon.

Miguel, représente la 5ième géneration de Maisonneuve à travailler la terre et traire des vaches. Ses ancêtres Pierre et Domithilde s’étaient installés à St. Pascal près du “Lake” en 1886. Au cours des décennies, la famille a fait preuve d’initiative et de courage. Arthur avait construit une citerne dans le grenier de l’ étable alimenter par un moulin à vent. Ainsi les vaches ne manquaient jamais d’eau fraîche.

Les grands-parents de Miguel, Jean-Marie et Paulette prirent possession en 1958. Il n’y avait alors qu’une petite grange et un troupeau de 22 vaches traitent à la main. Dès lors le couple travaille fort pour optimiser la ferme. Ils font recours à l’insimination artificielle et sont parmi les premiers de la région à faire drainer leur terrain. En 1967, Jean-Marie ajoute une aile à la grange originale et fait installer un convoyeur à chaîne pour le fumier (nettoyeur de dalot). Malgré tous leurs efforts et innovations, ils subissent un sérieux revers au début des années 80′ lorsqu’une partie de l’étable passe au feu. Heureusement les animaux sont sauvés et ils décident de reconstruire. Ensemble les deux nouvelles sections forment maintenant la partie principale de l’étable avec le bâtiment original bâti par Arthur Maisonneuve à l’arrière où quelques bêtes sont gardés dans des stalles.

Pendant les 10 premières années, Jean-Marie partait 4 fois par semaine avec son camion pour apporter son lait à Hawkesbury, à la “dairy” de son frère qui en retour le livrait dans la ville. Il est fier de dire que personne n’a jamais été malade d’avoir bu le lait de St. Pascal Baylon. Au début le lait était mis dans de grandes cannisses de 30 gallons dans le puit pour les garder au froid. Plus tard, ils ont pu entreposer le lait dans des bidons de 8 gallons dans un ‘cooler’ à l’eau. Puis enfin l’avancement technologique, a permit à Jean-Marie de se procurer un ‘bulk tank,’ un réservoir en vrac où le lait est gardé en large quantité jusqu’à l’arrivée du camion de transport

Paulette a de bons souvenirs du temps qu’ils demeuraient à la ferme quoi qu’elle admet que parfois elle s’inquiétait pour ses enfants. Ils aimaient s’amuser à prétendre qu’ils étaient Tarzan. Les 5 gars se servaient du câble de la grande fourche pendue après le vieux silo pour se balancer d’un bord à l’autre.

Comme le hockey a toujours fait partie des traditions familiales, les gars ont plus souvent qu’à leur tour joué dans la maison avec les résultats qu’on peut s’imaginer. Au printemps les gars aimaient s’amuser sur les morceaux de glace sur le ruisseau. Un employé de la municipalité est un jour venu demandé à Jean-Marie: “Sais-tu où sont tes jeunes?” Il a dû aller les chercher. Ils étaient tous trempé. L’un d’eux étaient pris sur son morceau de glace. Il avait beau demander de l’aide à ses frères, ceux-ci refusaient de l’assister; “Arrange-toi, t’as pas voulu m’aider tantôt, débrouille toi maintenant.”

Souvent les gars partaient à l’aventure et elle n’avait aucune idée où les trouver. Elle avait cependant figuré comment le découvrir. Elle sortait de la maison et appelait le chien. La direction d’où il venait (forêt, champ) trahissait le repaire des gars.

Les Maisonneuve ont toujours eu une réputation d’être des tannants. Ils aimaient blaguer mais aussi agacer. Paulette avait même de la difficulté à trouver des gardiennes. Suzanne, une jeune fille du coin, avait peur de s’occuper des gars et d’être le sujet de leur taquinerie. Une voisine lui avait dit: “Vas-y, ils ne sont pas si pire que cela!” Françoise Houle qui est allée à l’école no 8 avec Jean-Marie et ses frères et soeurs avoue que bien qu’ils étaient tannants, tout le monde les aimaient. Ils étaient populaire, ils avaient un charme reconnu: la ‘petite touche des Maisonneuve.’

Leurs 5 gars sont souvent partis jouer au hockey. Seul Guy démontre un intérêt à continuer à travailler la terre. En 1988 il prend la relève avec sa conjointe Danielle Boudreault qui a grandi au village. Ensemble ils continuent à améliorer le troupeau et le terrain. L’entreprise depuis 2003 s’appelle désormais la Ferme Guyelle. En 2004, Guy et Danielle font installer le retrait automatique pour faciliter la traite. L’une de leurs filles s’établit sur une ferme à Ste-Rose avec son conjoint, et en 2016 Danielle et Guy passe le flambeau à leurs fils Miguel qui s’installe avec sa compagne Joannie Campagna sur la terre ancestrale. Le 1er janvier 2016, l’entreprise familiale prend un nouveau nom: Ferme Maisonneuve.

La plus ancienne partie de la grange est bien protégée entre les deux silos.

Fidèle à la tradition où chaque nouvelle génération a apporté des améliorations à l’opération et augmenté le troupeau, Miguel, motivé et bon travaillant a triplé la superficie de son terrain. Il a acheté d’anciennes terres agricoles où les broussailles avaient repris le dessus. Au début lui et son père lorsqu’ils avaient du temps libre coupaient et broyaient les arbres. Bien qu’il aimait ce travail, cela prenait trop de temps. Il avait investi beaucoup d’argent, et le terrain se devait de devenir rentable. Il a alors engagé un gars avec un plus gros broyeur pour faire avancé les travaux. Une fois tous les arbres, arbustes et souches enlevés, il a fait faire du drainage et pourra ensemencer ce printemps. Il y fera en rotation la culture de foin, de mais et de soya. Une partie de la récolte servira à nourrir son troupeau, le reste sera vendu.

Miguel représente la 5ième génération de Maisonneuve à vivre sur la ferme. Ses ancêtres seraient bien surpris de voir comment la vie à la campagne a changé et continuera de s’améliorer.

Au moment d’écrire ces lignes, Miguel attend le retour du beau temps pour que le contracteur puisse terminer la nouvelle salle de traite. La construction avait été décidé en 2017 lorsque les fermiers pouvaient se procurer du quota gratuitement. Comme plusieurs cultivateurs de la région ont acheter plus de vaches et choisit de bâtir de plus grandes étables ou de nouvelles salle de traite, les contracteurs ne fournissaient pas. Miguel a attendu son tour et le tout devait être fini pour l’automne 2018. Malheureusement peu de temps après le début des travaux, le mauvais temps est venu retarder encore plus le processus. Ceci a grandement acompliqué les choses puisque Miguel avait déjà acheté 57 autres vaches et payé pour tout le nouvel équipement. Il s’est adapté à la situation et a fait la location d’espace pour les vaches dans leur étable d’origine. Maintenant il espère seulement que l’horaire des travaux lui sera plus favorable et que la salle de traite ne sera pas prête en même temps que les semences car les deux nécésiteront toute son attention.

La partie arrière du bâtiment présent, construite par son arrière grand-père, ne répond plus aux normes et ne peut donc plus accueillir d’animaux dans ses 6 enclos. Miguel explique comment au début, avant l’installation du nettoyeur, il fallait sortir le fumier avec des pelles et une brouette. La famille nettoyait une stalle par jour, tous les jours de la semaine sauf le dimanche.

Depuis ce temps la situation et les travaux ont bien changé. Pour l’instant ses enfants sont encore trop jeunes, alors ce n’est pas une ribambelle de jeunes Maisonneuve qui aide à la ferme. En attendant l’arrivée des robots, une jeune employée s’occupe de la traite des 90 vaches. De plus il faut nourrir et s’occuper des 120 taures et vaches en tarissement ainsi que des petits veaux. Son père l’avait prévenu lors de la transition qu’il continuerait à aider mais seulement dans les champs. Sa mère aussi vient prêter main forte.

Les travaux pour la nouvelle salle de traite, à l’extrémité ouest de la plus récente addition, reprendront dès que la température sera plus clémente.

Les murs de la grange dans ses différentes phases en ont vu de toutes les couleurs. Ils y a eu toutes sortes d’aventures et des bras cassés sous son toit. Les générations à venir n’ont pas finie de découvrir les histoires… Miguel ne fait que commencer son parcours et ses enfants sont encore bien jeune. Son grand-père lui a même demandé récemment si l’ouvre-bouteille était encore en place.

De mon jeune temps, cette étable sur le chemin Pilon à St-Pascal Baylon appartenait à Ubald et Colombe Paquette.
Ancienne grange au coin du chemin Poupart et St- Jean appartenant maintenant à André Laviolette à Rockland.


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